Marathon de Paris 2013, entre joie et frustration

photoC’était pourtant simple et même écrit en rouge sur mon dossard ! Je disposais de 3 heures pour parcourir les 42.195 kilomètres de mon troisième marathon. Mais cette distance mythique ne se laisse pas dompter si facilement et c’est finalement ce qui lui confère une grande partie de son intérêt : l’incertitude de la dernière heure de course où tout peut arriver, le pire comme le meilleur.

Quand je m’introduis ce dimanche 7 avril dans le sas qui m’a été attribué, je grelotte comme une vulgaire clochette. La température extérieure ne dépasse pas les 3 degrés Celsius. Combinée au stress que je ressens très concrètement à l’approche du départ j’ai cette désagréable sensation de flageoler sur mes jambes. Cette dépense gratuite de calories avant même la première foulée m’inquiète un peu pour la suite des événements et je préfère me concentrer sur le départ imminent. J’ai été rejoint dans le sas par The Pink Runner dont la grande expérience me rassure, puis par Jean-Pierre et Julien qui ont le même objectif que moi et dont je suis content de recevoir le renfort. Les choses sérieuses vont pouvoir commencer !

Il y a énormément de monde au départ mais l’avenue des champs Elysées est un formidable terrain de jeu pour ces dizaines de milliers de marathoniens. A aucun moment je ne suis gêné, j’arrive même à rester au contact de Jean-Pierre sur les premiers kilomètres. Nous progressons ainsi jusqu’au bois de Vincennes dans un silence qui témoigne de notre concentration. Nous passons, peut-être un peu rapidement, en moins de 42 minutes aux 10 kilomètres mais je me sens bien, ma foulée est fluide et déliée.

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La traversée du bois de Vincennes se poursuit sereinement, nous saluons Sandrunning et Christophe au passage du 13ème kilomètre et de retour dans les rue de Paris nous franchissons le semi-marathon en moins d’1h29″, conformément à ce que j’avais prévu de mon côté. Je suis toujours assez confiant mais terriblement humble devant ce second semi-marathon dont tout le monde s’accorde à dire qu’il est plus exigeant que le premier. Abordé avec la fatigue accumulée au cours des 21 premiers kilomètres il peut se révéler dévastateur !

Après le second passage par la place de la Bastille noire de monde, il est temps de descendre sur les quais. Il est près de 10h30 et le soleil qui a bien réchauffé l’atmosphère produit sur les bâtiments des quais qui nous font face une lumière magnifique. Je me dis à cet instant que je ne profite pas assez de l’environnement dans lequel j’évolue mais cette pensée est vite dissipée par l’entrée dans le tunnel  long et glauque qui passe peu ou prou sous le jardin des tuileries. A l’orée du 27ème kilomètre, la minuscule montée qui permet de s’extirper du tunnel me rappellent que mes jambes courent déjà depuis près d’1h45′ et immisce quelque inquiétude dans ma tête pour la suite. Heureusement, l’ami Grégo, fidèle supporter photographe des grandes occasions lorsqu’il ne court pas nous invective et nous insuffle une vague d’énergie qui fait du bien avant d’entamer ce qu’il reste de plus dur sur un marathon ! Sur ses clichés, j’ai l’air bien, presque fanfaron !

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Au kilomètre 29 je suis rejoint par Fabrice, qui terminera la course en 3 heures, ostéopathe de son état, traileur performant, centbornard… Nous discutons quelques secondes, je lui fais part de mes inquiétudes et il tente de me rassurer. « Dans moins d’une heure tu seras à l’arrivée » Si seulement il avait eu raison… C’est au même instant ou presque que je suis rejoint par les meneurs d’allure des 3 heures. Un premier, à l’allure suspecte puis un second. Ils prennent quelques mètres d’avance et resteront en point de mire jusqu’au 32ème kilomètre où mon calvaire, c’est le mot consacré, va commencer. Je suis sans nouvelle de Jean-Pierre depuis déjà quelques hectomètres. J’ai reçu de nouveaux encouragements avant de grimper vers Roland-Garros. Ceux de Clara et Nicolas venus avec la petite Nina pour nous pousser de leurs voix à cet instant crucial. Malheureusement c’est quelques centaines de mètres plus loin que mon cerveau refusera ce dont mes jambes continuaient pourtant à avoir envie : courir.

fin

Je vais dorénavant alterner jusqu’à l’arrivée de courtes périodes de marche et de course. Incapable de trotter, je me retrouve soit à marcher, soit à courir à 13km/h environ. Un phénomène surréaliste qui me surprend totalement. J’attends avec impatience le 39ème kilomètre où je sais que Greg va me porter comme il le fera avec tous ses amis en difficulté, jouant le rôle d’un véritable saint-bernard du bitume ! Je lui offre le spectacle lamentable du marathonien en détresse mais j’en profite pour emmagasiner l’énergie qu’il essaie de me transmettre pour finir correctement ce marathon. J’en veux pour preuve l’allure que j’avais encore en traversant la place Dauphine devant l’objectif de Maya !

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J’achève donc de manière la plus digne possible mon deuxième marathon de Paris en 3 heures 6 minutes et quelques secondes dans un mélange confus de sentiments. La satisfaction d’avoir abaissé mon record personnel de plus de 20 minutes et la déception d’avoir laissé filer la barre des 3 heures que j’ai eu du mal à revendiquer pendant toute ma préparation mais qui n’était pas hors de portée. Au lendemain de cette course je suis déçu de n’avoir pas su concrétiser tous les efforts fournis à l’entrainement depuis le début de l’année qui tendaient à montrer que l’exploit était possible. Je suis également déçu de ne pas avoir pu récompenser Jean-Christophe pour tout le temps qu’il a passé à me suivre, me rassurer, me pousser, me bousculer aux moments opportuns et surtout croire en moi jusqu’au bout. C’était la première fois que je m’entraînais de façon très structurée et j’ai appris beaucoup. Mieux vaut tard que jamais !

final

48 réflexions sur “Marathon de Paris 2013, entre joie et frustration

  1. 20 minutes de progression sur la distance et à la vitesse a laquelle tu cours c’est juste énorme!
    En plus, tu t’es blessé et jeune papa …
    D’ailleurs, il faut m’expliquer comment tu fais…Tu cours un marathon dimanche en pratiquement 3h, tu as un enfant en bas age, et lundi midi tu ponds un beau compte rendu …J’ai un CR sur le feu depuis une semaine et j’arrive pas à le terminer :p
    Donc un double-bravo pour ces performances…pas de regrets à avoir

    1. Merci ! L’enfant en bas âge en question est assis à côté de moi et a quelque peu perturbé la rédaction de cet article que je trouve incomplet à la relecture ;)

  2. Bah moi, j’ai juste envie de te dire chapeau bas. Cela reste une magnifique performance, une énorme progression et cette expérience te servira obligatoirement pour tes prochains défis sur l’épreuve-reine.
    Savoure ce RP comme il se doit… Bonne récup’,

  3. « je me retrouve soit à marcher, soit à courir à 13km/h »
    interessant :p

    Tu ne parle ni de l’hydratation, ni de l’alimentation dans ton CR… tu te prends le mur de pleine face au 32em ca c’est ok, ce qui m’étonne c’est que tu n’arrive pas à faire repartir la machine quelques km plus tard : manque de carburant ou manque de mental ?

    quoique tu en pense ca reste une magnifique performance, BRAVO !!!

    1. Merci. Effectivement je n’aime pas trop aborder le détail pratique dans mes récits, je ne trouve pas ça très poétique, et pourtant il y avait matière entre le matos et l’alimentation. Sur ce dernier point je ne pense pas avoir commis d’erreur. Le mental a clairement failli. Ma chute d’il y a 10 jours a laissé planer quelques doutes sur ma participation et j’ai eu un peu de mal à me recentrer sur la course. Mais ça ne peut pas être l’excuse principale. Le pire serait d’avouer que je ne me suis jamais senti dans la peau d’un marathonien sub 3h… oups

  4. I’m so disappointed!! quelle claque tu t’es pris quand même, ce fut un beau mur :-)
    Dommage, je te voyais vraiment sous les 3h, pas seulement un petit 2h59′ et des brouettes…
    Tant pis, une prochaine fois, ça le fera ;-)

  5. Féliciation!
    Lorsque tu m’as doublé avant la place de la bastille (retour) alors que j’avais engagé pour ma part mon allure des mauvais jours, je me suis dis que tu étais dans le bon sens pour réaliser quelque chose de beau.
    Ta foulée, qu’il m’arrive de croiser au bois de Vincennes, était toutjours aussi dynamique et impressionnante. Tout comme sur la photo de la place Dauphine.
    Tu as peut-être tout simplement eu le plaisir de connaitre le mur que l’on redoute tous parceque l’on veut en venir à bout.
    Cette expérience te permettra de faire un temps encore meilleur que celui que tu n’imaginais pas atteindre cette année.
    La légère déception passée, tu t’autorisera à être fier de ce que tu as accompli avec la plaisir d’avoir un nouvelle objectif commençant par « 2 ».

    Bonne journée à tout ceux qui aujourd’hui ont mal aux cuisses, genoux, chevi…

    JY

  6. C’est vrai que c’est très difficile de passer cette putain de barre des 3h. J’y suis jamais parvenu, ayant connu les meme problèmes de douleurs musculaires m’obligeant à alterner aussi marche et trot. Continue à progresser sur 10 et semi, et ca devrait, je dis bien ca devrait, passer un de ces jours…

  7. Ne sois pas déçu de ta performance. N’oublie pas que tu as tout donné . Et prépare toi pour un autre marathon. Tu as tout ce qu’il faut pour passer sous les trois heures.

  8. Une déception, mais surtout une très belle performance de finir un marathon. Puis, 3h06, c’est quand même un bon chrono ;) Bravo et bonne récupération !

  9. Ne sois pas déçu. Tu as fais quelque chose de magnifique. Tu es allé titiller tes limites, le seuil de la souffrance quasi intolérable : c’est le lot d’un marathonien. Et tu l’as fait avec une perf canonissime que 97% des coureurs n’arriveront jamais à toucher. Non, conserve de ce marathon ces sensations surréalistes que l’on ne peut connaître que sur cette singulière épreuve où tu as donné le meilleur de toi-même. Et c’est tout ce qui compte.

  10. Pour un 3 eme marathon 3 h 06 ca reste du tres lourd, meme si tu as la deception de ne pas avoir passer les 3 heures, je suis sur que ca sera la prochaine fois!

  11. Le moins de 3h, tu l’as dans les jambes. C’est évident !
    AMHA (tu ne me le demandes pas mais je le dis qd même car tu n’es pas obligé de lire :-p), la lutte contre le froid dans le sas de départ a bien tapé dans tes réserves énergétiques, avant même le premier de tes 42195 m…
    Après, c’est sûr que ce n’est jamais bon pour le moral de voir revenir les ballons alors qu’on avait pris de l’avance au départ, surtout quand çà se passe à l’entrée du « money time ». Dans ces moments-là, si tu commences à douter alors qu’il reste encore une heure de course…

    J’étais à Milan hier alors, pour éviter çà, j’avais décidé de laisser partir les ballons un peu devant moi en espérant pouvoir les reprendre à la fin. Bref, j’espérais le negative split en ramassant du monde dans les derniers kms. Sans réussite : beau positive split de près de 6′ (sic) et cuisses bien détruites à l’arrivée. Mais sans regret car, à l’évidence (et à la différence de toi), j’avais pas fait ce qu’il fallait pour me préparer et je n’ai jamais été dans le bon rythme hier.

    Partie remise pour cet automne ?! ;-)

    1. Ah mais oui ! Je la tiens mon excuse grâce à toi :) Plus sérieusement j’ai entendu plusieurs coureurs se plaindre de douleurs musculaires aux jambes assez tôt dans la course. Il est probable que nous ayons laissé quelques forces dans les sas de départ mais c’était notre lot à tous !

      Désolé pour Milan ! Savais-tu que Salvio (jecoursparis.fr) y était aussi et a couru dans un chrono sensiblement égal au mien ?

  12. Oui, je l’ai reconnu vers le km7. On a échangé qq mots sympas et couru ensemble jusque vers le stade Meazza. Ensuite, je crois qu’il s’est arrêté qq instants mais il me semble qu’il m’a redoublé et définitivement semé vers le km32 ou 33 (à ce moment-là, j’étais bien dans le dur et j’avais pas trop envie de déconner…). Je ne l’ai plus revu (il a fini en quel chrono ?).
    Non, non, le chrono n’est pas sensiblement égal au tien. Je n’ai jamais été dans l’allure pour tomber les 3h alors, dès le km5, j’ai compris qu’il ne me fallait pas insister (A Rome, il y a 3 ans, j’avais insisté… et j’ai littéralement explosé). Toi par contre, tu courais dans le bon tempo. Et puis, je n’ai jamais couru Paris (et pas du tout envie de le faire) mais je crois vraiment que Milan est un parcours plus propice pour faire un PB.
    J’ai couru 2 fois en moins de 3h mais jamais au printemps. Peut être que c’est mieux ? ;-p Allons faire un tour du côté de Francfort, d’Amsterdam ou de Turin…

    1. Ciao Dajo, je me suis arrêté pour 1′ pour aller au toilette! quel dommage de t’avoir perdu en ce moment, tu avais une très belle allure. je ne t’ai pas vu quand je t’ai passé, convaincu que tu étais bien avant que moi.

      1. Pas de souci Salvio. Au plaisir de lire ton CR (j’écrirai le mien demain ou jeudi) et félicitations pour ta régularité en course !
        PS: Philippe, c’est promis, fin de cet hors sujet ;-)

  13. Oups, je viens de relire ta réponse. Tu as répondu à ma question / Salvio et une bonne partie de mon précédent commentaire est hors sujet. Dsl.

    1. On est tous un peu fatigués ce soir ;)
      Je n’ai pas répondu sur le marathon roulant d’automne. L’idée est bonne mais ce ne sera pas pour 2013. Je ne sais pas encore bien de quoi sera faite la suite de l’année. Bonne suite de recup’ !

  14. Félicitations tout de même pour ce temps. Belle leçon de courage que de finir malgré la douleur et l’envie de tout lâcher qd on voit l’objectif initial s’éloigner. Dur de te voir marcher à 400m de l’arrivée mais courageux tu es reparti !
    Récupères bien et fixe toi des objectifs à court ou moyen terme, genre faire sauter ton record sur 10 kms ! 1 mois et demi après un marathon avec qques séances et un parcours bien roulant il devrait voler en éclats !

    1. Merci, c’était étonnant de te voir là :) En parlant des 400 derniers mètres, je les ai courus à 16km/h, un signe que physiquement j’étais moins sec que mentalement. Mais c’est vrai que quelques dizaines de mètres avant j’ai marché quelques secondes :/

  15. Bravo pour ton temps, 20′ de mieux ce n’est pas rien.
    Ces foutues 6′ seront bientôt avalées.
    Si tu veux les tenter dans un mois pour la route du Louvre je peux te lâcher mon dossard, je risque de ne pas le faire.

  16. Bon bah tu sais ce qu’il reste à travailler pour avaler ces 6 minutes (voir plus) : du mental et de la PPG pour retarder l’apparition des douleurs musculaires !
    J’ai accompagné un peu une personne de mon club qui a fini en 2h55 donc j’ai pris le temps de regarder les arrivées histoire d’encourager qques têtes connues !

  17. Belle course, Philippe. Je mesure néanmoins ta déception. Il y a un an, j’ai mis 3h03… J’ai l’impression d’avoir été beni des Dieux. 3h00, c’est vraiment costaud. Mais compte tenu de tes performances sur des courses plus courtes, je te sais capable de les faire tomber. Force et honneur. R.Gou

    1. Ah ben tu vois c’est sympa de venir faire un tour par ici parce qu’en fait quand j’étais sur les bases des 3h dimanche, j’ai repensé à ton marathon de 2012 et je me suis dit que c’était pas possible que je te vole la vedette !!

  18. Moi aussi je suis déçu pour toi. J’avais balayé les 3h depuis pas mal de temps et « mis un billet sur ta tête » comme dirait La Souris.
    Mais peut-être que tu n’as pas voulu assez y croire comme tu l’écris.
    Il faut dire que tu partais de loin ; et tomber un chrono de 27′ sur un effort constant et dur comme ce marathon ne se fait finalement pas en une fois.
    moi aussi il me fait un peu peur. C’est bon signe d’avoir peur non ? ;)

    Mais maintenant tu sais un peu mieux ce que ces moins de 3h représentent et tu pourras les aborder plus sereinement la prochaine fois. Ce ne sera pas plus facile, l’entrainement sera surement proche, surement moins structuré, mais toujours dur, mais la tête sera là j’en suis sur pour soutenir la foulée volante !
    Vivement la suite ;)

    1. Merci Julien. Et merci pour avoir suivi de près ces derniers mois ma préparation et pour avoir apporté ces échanges et cette interactivité qui n’a pas de prix quand tu te demandes si tu es sur le bon chemin :)

      A J+5 c’est assez bizarre ce que je ressens. J’ai pas du tout le sentiment d’avoir couru un marathon comme je l’avais vécu les 2 premières fois, mais 3 courses distinctes avec ces 25 premiers kilomètres très faciles (…) puis ces 5/6 bornes de doute quand je commence à sentir progressivement les cuisses qui gonflent et se durcissent, enfin un 10 bornes à l’arrache où je peste à haute voix dès que je mets à marcher. Au final je ne ressens même pas l’émotion dont je parlais sur Dailymile en franchissant la ligne d’arrivée,

      1. Ça me paraît logique. Tu étais sur d’aller au bout. Seul le chrono importait et tu ne peux qu’être déçu qu’il n’est pas été au rendez-vous.
        Pour le manque d’émotions, c’est donc logique. J’arrive même à penser que c’est le propre des courses « courtes » sur route. On est sur de finir, et on sait vite si le temps sera bon ou pas. Il y a moins de chance d’être surpris…

  19. Relativise, si près des 3h pour ton troisième c’est une belle perf’! Je comprends et je partage, je t’y voyais déjà! L’expérience acquise payera… Bonne récup!

  20. t’avais fait un sacré hiver, c’est dommage je croyais que les 3h00 allait tomber, tu en es pas loin, le prochain sera le bon, et sur un parcours plus roulant ça le fera

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